my kingdom for a toy

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STAR ACE TOYS HARRYHAUSEN


SUPER VINYL STATUE SERIES (2020-)

Star Ace Toys est actuellement le second - et probablement dernier - fabricant à proposer des produits dérivés tirés de l’univers d’Harryhausen. Il succède à la société X-Plus qui avait exploité la licence au début des années 2000. Les deux entités collaborent d’ailleurs sur ce nouveau projet initié à l’occasion des 100 ans de la naissance de l’animateur.

 

La gamme « Super vinyl » désigne des statues en plastique de taille imposante (plus de 30 centimètres de haut et/ou de long), un format jusque-là inédit pour les créations d’Harryhausen. Chaque référence est déclinée en deux versions : l’une ordinaire (dite « normal ») et l’autre collector (dite « Deluxe DX »). La seconde est livrée avec un accessoire supplémentaire : socle, élément de décor ou personnage.

 

1) YMIR (2022) version Deluxe (SA9022)

 

Sorti en 1957, le film 20 million miles to earth est réalisé par Nathan Juran, ancien directeur artistique devenu metteur en scène. L’homme tourne en majorité des séries B, notamment des westerns, avant de finir sa carrière à la télévision. Sa filmographie est aujourd’hui tombée dans l’oubli, à l’exception de certaines œuvres fantastiques disponibles sur support numérique (DVD, puis Blu-ray). Si certaines productions se révèlent anecdotiques (The deadly mantis, The brain from planet Arous), d’autres méritent qu’on s’y attarde, notamment The black castle (1952) ou Attack of the 50 foot woman (1958). Après 20 million miles to earth, Ray Harryhausen assure les effets spéciaux de deux autres longs métrages signés Nathan Juran : The seventh voyage of Sinbad (1958) et First men in the moon (1964).

 

Le film repose sur une intrigue relativement originale pour l’époque : de retour de Venus, un vaisseau spatial américain s’écrase au large des côtes italiennes, libérant accidentellement un oeuf extra-terrestre. Après éclosion, ce dernier révèle une créature à l’aspect reptilien appelée Ymir, un nom supprimé du montage final. Désorienté, le monstre se heurte à l’hostilité des humains alors que son corps grandit de façon démesurée ; une approche scénaristique qui n’est pas sans rappeler King Kong. Le film est interprété par William Hopper (déjà présent au casting de The deadly mantis) et Joan Taylor (présente au casting de Earth vs the flying saucers). Les acteurs évoluent dans des décors inhabituels pour ce genre de production, notamment la ville de Rome et son Colisée.

 

L’interprétation d’Ymir par Star Ace Toys se montre particulièrement fidèle à la vision de Ray Harryhausen. Le modèle impressionne autant par ses dimensions (32 centimètres de haut) que par le soin accordé à la sculpture, cette dernière s’attachant à reproduire la marionnette vue à l’écran dans ses moindres détails, qu’il s’agisse des proportions, de l’expression faciale ou bien du relief de la peau (ostéodermes, veines, plis…). Dépourvu d’articulations (ou presque), il est assimilable à une statue, terme d’ailleurs employé par le fabricant. Il dispose en réalité de deux éléments de jouabilité, à savoir une mâchoire inférieure articulée et des yeux orientables (en pratique, c’est impossible !). Ces « gadgets » me paraissent dispensables, d’autant que l’exemplaire présenté louche comme le montre la photo 1 !

 

Le jouet ne nécessite aucun assemblage, ce qui évite les jointures inutiles. Ces dernières ne sont cependant pas absentes, le moule étant constitué de plusieurs éléments, notamment au niveau de la queue (voir photos 2 et 3). Elles restent néanmoins discrètes, notamment si l’on se place à distance raisonnable.

 

Au final, on obtient un monstre en plastique non articulé, mais affublé de fonctions ludiques, soit un compromis bancal entre une figurine et une statue. Star Ace aurait dû opérer un choix clair : soit une statue en polystone à l’aspect plus qualitatif que le plastique ; soit une figurine véritablement articulée, une option certes inédite, mais qui aurait trahi « l’esprit » des sculptures d’Harryhausen, l’animateur dissimulant le squelette sous une enveloppe corporelle sans jointures. Vous l’aurez deviné, ma préférence va aux statues en polystone, une ligne de produit mieux adaptée que le fabricant a lancé sur le tard.

 

Faute de budget suffisant, 20 million miles to earth est tourné en noir et blanc, au grand regret de Ray Harryhausen. En 2007, ce dernier participe à la création d’une version colorisée du film, une démarche louable pour certains, mais une hérésie pour moi. Star Ace s’inspire à l’évidence de cette nouvelle copie (diffusée sur dvd) pour peindre le jouet, les affiches d’époque ayant opté pour des teintes variables (vert, gris ou même brique).

 

La version DX présentée ici contient deux accessoires qui pourraient paraître anecdotiques, à savoir un lampadaire déformé (photo 1) et une victime à glisser dans la main d’Ymir (voir photo 4). En réalité, ces éléments sont pertinents. Ils permettent de mettre en scène le monstre à deux stades successifs de sa croissance : d’abord l’équivalent d’un lampadaire ; ensuite dix fois plus grand qu’un humain. Ils illustrent également de manière allusive les ravages d’Ymir dans la ville de Rome.

 

Le lampadaire en plastique vient se fixer au moyen d’un aimant sur une base en résine. Celle-ci représente un sol déformé, type bitume. Sculpture et peinture sont assez sommaires, avec un aspect bon marché dommageable. Il en est de même du malheureux personnage qui semble véritablement bâclé (photo 6). Au vu de ce constat, mieux vaut donc opter pour la version « regular », qui plus est moins chère.

 

La boîte est à l’image de la statue, c’est-à-dire volumineuse. La face avant est recouverte d’une photographie du jouet en situation. Sur le côté, on trouve une biographie sommaire de Ray Harryhausen (non photographiée). Ymir et ses accessoires se logent dans des coques en plastique thermoformées, conditionnement insuffisant au vu du poids des jouets (photo 9).

 

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Cet article sera mis à jour à chaque nouvelle entrée.


01/02/2024


INTRODUCTION RAY HARRYHAUSEN

Né aux Etats-Unis en 1920, l’artiste Ray Harryhausen s’illustre dans le domaine des effets spéciaux, un secteur considéré à l’époque comme un maillon secondaire de l’industrie hollywoodienne.

 

Très impressionné par King Kong (1933), le jeune homme se découvre une vocation pour l’animation et les trucages. Il a l’occasion de rencontrer Willis O’Brien, l’inventeur du procédé « stop motion » (technique dite « image par image » utilisée jusqu’à l’avènement du numérique) qu’il l’encourage dans cette voie.

 

Après quelques expériences dans les courts-métrages, Harryhausen est finalement recruté en 1949 comme assistant sur Mighty Joe Young, un projet regroupant une grande partie de l’équipe créative de King Kong : les producteurs-réalisateurs Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack, la scénariste Ruth Rose (une pionnière dans ce domaine), Willis O’Brien (le responsable des effets spéciaux) et Marcel Delgado (le créateur du squelette de King Kong) !... Pour le jeune animateur, le rêve de sa vie se réalise. Malheureusement, en dépit de ce casting prestigieux, le film se révèle décevant, la faute à une intrigue assez niaise.

 

En 1953, Ray Harryhausen obtient son premier contrat en tant que responsable des effets spéciaux sur l’étonnant The beast from 20 000 fathoms, une réalisation d’Eugene Lourié (ancien chef décorateur de Renoir) sur un scénario de Ray Bradbury, ami d’université d’Harryhausen. The beast est intéressant à plus d’un titre. En effet, outre la première créature conçue par l’animateur, le film contient un propos intéressant sur les effets possiblement ravageurs des essais atomiques avec le réveil d’un monstre préhistorique. Pour ce tournage, Harryhausen met au point le procédé "Dynamation" qui consiste à associer des séquences déjà filmées (projetées en arrière-plan) à des créatures animées en stop motion, ces dernières semblant interagir avec les comédiens.

 

Grâce au succès commercial du film, Ray Harryhausen entame une fructueuse collaboration avec le producteur Charles Schneer. Ensemble, ils développent trois films en noir et blanc mémorables : It came from beneath the sea (1955 - un monstre marin ravage la ville de San Francisco), Earth vs the flying saucer (1956 - une invasion extra-terrestre qui servira de modèle à Independance day) et 20 000 miles from earth (1957 - une créature extra-terrestre ramenée sur Terre devient une dangereuse menace).

 

L’année suivante, Ray Harryhausen participe à son premier tournage en couleur : il s’agit de The seventh voyage of Sinbad, personnage qu’on retrouvera dans deux longs métrages des années 70 (The golden voyage of Sinbad et Sinbad and the eye of the tiger). Ce film obtient un succès commercial considérable. L’artiste est ensuite sollicité pour The three worlds of Gulliver (1960) et Mysterious island (1961). A l’occasion de Jason and the Argonauts (1963), ce professionnel désormais reconnu met au point une séquence remarquable, celle d’un combat à l’épée entre les héros et une horde de squelettes. Il enchaîne avec First men in the moon en 1964.

 

Ray Harryhausen passe ensuite par le studio Hammer (voir ici) pour donner vie aux dinosaures de One million years B.C. (1966). Il reste dans le domaine préhistorique avec The valley of Gwangi (1969), un projet basé sur d’anciens storyboards conçus par son maître Willis O'Brien.

 

L’homme achève sa carrière en 1981 avec le film Clash of the titans, un peplum fantastique devenu anachronique à l’heure des space operas.

 

Décédé en 2013 à l’âge de 93 ans, Ray Harryhausen peut s’enorgueillir d’avoir nourri l’imaginaire de millions de spectateurs et inspiré plusieurs générations de professionnels (spécialistes des effets spéciaux, réalisateurs (Spielberg, Cameron. Jackson, Burton…)). Aujourd’hui, le nom et l’oeuvre de ce pionnier des effets spéciaux est inconnu du grand public, la cinéphilie étant une discipline en perdition, sans doute vouée à disparaître d’ici vingt ans. Nous avons pourtant la chance de disposer de la quasi-intégralité du catalogue « Harryhausen » au format blu-ray, dans des versions somptueusement restaurées, y compris en France (merci à l’éditeur Sidonis-Calysta !). Certains scénarios ou péripéties peuvent parfois paraître datés, notamment aux yeux des plus jeunes. Néanmoins, la plupart de ces films restent passionnants. Semblables à des capsules temporelles, ils témoignent d’une époque révolue ; une époque où la création artisanale dégageait un charme délicieusement naïf, bien loin des productions abrutissantes et sans âme d’aujourd’hui.

 

S’agissant d’un marché de niche, les produits dérivés consacrés à l’oeuvre d’Harrysausen ne sont pas nombreux. En 1981, les créatures de Clash of the titans sont les premières créations de l’animateur à bénéficier d’une représentation en jouet grâce au fabricant Kenner. Il faut ensuite attendre 2001 pour voir apparaître de nouvelles références. La société japonaise X-plus exploite alors de façon relativement complète et inédite la filmographie d’Harryhausen : statues en résine 12’’, série « chess », figurines en vinyl 8’’ et 12’’. Pendant près de vingt ans, les collectionneurs doivent se contenter de cette unique gamme, au demeurant satisfaisante.

 

En 2021 et contre toute attente, la fondation gérant le patrimoine de l’artiste passe un accord avec la société hongkongaise Star Ace Toys afin de développer un merchandising ambitieux à destination des collectionneurs. L’éventail de produits est large : statues et bustes en polystone, figurines en plastique aux dimensions impressionnantes, sans oublier des maquettes. De quoi ravir les fans de la première heure et faire découvrir cet univers aux plus jeunes.


14/01/2024