my kingdom for a toy

Réalisé par Francis Ford Coppola en 1992, Bram Stoker's Dracula constitue à ce jour la meilleure adaptation audiovisuelle du roman éponyme paru en 1897. En parallèle, le film retrace les débuts du cinématographe avant de revisiter l'histoire des trucages du XIXème à la seconde guerre mondiale.

Depuis sa publication, le livre de Stoker est devenu une source d'inspiration pour les artistes. Ainsi, après une pièce de théâtre, le cinéma muet s'empare de la légende du vampire : Murnau réalise en 1922 une première version "officieuse" sans l'accord des ayants-droit (Nosferatu). Dracula est ensuite porté à l'écran par Tod Browning, devenant le premier film d'horreur parlant de l'histoire d'Hollywood (1931). Détail étonnant, un tournage en espagnol se déroule la nuit dans les mêmes décors : il s'agissait d'une pratique courante avant la généralisation du doublage. Dans la version de Browning, Dracula est interprété par Bela Lugosi, comédien d'origine hongroise maîtrisant mal l'anglais. Ce rôle va littéralement "vampiriser" l'acteur qui restera cantonné aux productions fantastiques, souvent médiocres. Je vous invite à visionner Ed Wood (1995), film dans lequel Tim Burton rend hommage à Lugosi sans dissimuler sa déchéance.

En 1958, le studio anglais Hammer réalise la première version en couleur de Dracula. Face au succès, les producteurs britanniques vont exploiter le filon jusqu'en 1974. Christopher Lee incarne désormais le sulfureux vampire. Comme Lugosi, le comédien restera longtemps prisonnier du rôle malgré ses efforts pour y échapper. Il va tomber dans l'oubli avant de connaître un gloire tardive grâce à Tim Burton, puis au Seigneur des anneaux et Star wars.

La version de Coppola repose sur un texte brillant écrit par James V. Hart. Surpassant le roman, le scenario introduit l'idée que Mina Harker, épouse du clerc de notaire londonien, est la réincarnation d'Elisabeta, la femme de Dracula. De ce fait, il rend le personnage du vampire attachant, prisonnier d'un amour qui le mènera à sa perte. Comme indiqué précédemment, le film se veut un hommage aux techniques d'effets spéciaux utilisés avant-guerre. Ces trucages, parfois "visibles" ou "imparfaits", confèrent à l'ensemble un charme suranné. Il n'y a qu'un seul plan numérique à l'écran : un reflet de quelques secondes dans une vitre.

Outre un scenario et une réalisation virtuoses, la réussite du projet tient à l'interprétation fiévreuse et bouleversante du duo Gary Oldman-Winona Ryder, aux somptueux costumes conçus par Eiko Ishioka et aux décors de studio à l'ancienne. L'ensemble est magnifié par la musique de Wojciech Kilar, fortement influencée par la partition de John Williams composée pour le Dracula de 1979.

Si Bram Stoker's Dracula était sorti en 2020, le marché aurait été inondé de figurines à l'effigie du vampire. Mais, en 1993, les fabricants de produits dérivés pour adultes n'existaient pas. L'industrie était encore persuadée que le marché du jouet était réservé aux enfants. S'agissant d'une oeuvre jugée "violente" et "sexuée", aucun fabricant majeur n'osa acquérir les droits malgré le succès du film au box-office. A l'époque, on trouvait simplement quelques maquettes à monter, ainsi que des personnages non peints pour jeux de rôle.

Depuis, malgré la qualité du film et ses éditions régulières sur support dvd, blu-ray et 4K, la licence demeure sous-exploitée. Pourtant, elle offre de nombreuses possibilités en matière de figurines et de statues. Cet oubli est vraiment regrettable. J'espère qu'un jour un fabricant sera capable de remédier correctement à ce vide. Vous trouverez donc ci-après la liste (non exhaustive) des rares produits dérivés disponibles, hors maquettes.

1) BRAM STOKER'S DRACULA DELUXE ACTION FIGURE 2-PACK MCFARLANE (2006)

Sorti en 2006, soit 14 ans après le film, cet ensemble contient deux spectaculaires incarnations du vampire : le loup-garou et la chauve-souris. Les figurines à l'échelle 8'' (environ) sont accompagnées de quelques éléments de décors présents dans le flm : une jarre du jardin-labyrinthe et une caisse de terre en provenance du château de Dracula.

Nous devons cet unique coffret à la société McFarlane, le pionnier des produits dérivés pour adultes. A la fin des années 90-début 2000, ce fabricant américain s'attaquait à des licences audiovisuelles peu exploitées, ce qu'il ne fait plus aujourd'hui (pour plus de précisions : voir ici).

Les langues figurant sur le packaging sont l'anglais, l'espagnol et le français. La boîte scellée est à l'état neuf. Le rhodoïd intérieur commence à jaunir malgré un stockage à l'abri de la lumière. On note une étiquette de prix d'époque ("34,90 €").

2) DRACULA RED 12'' REDMAN TOYS (sorti en 2018)

D'après les informations que j'ai pu recueillir sur internet, un artiste américain développa deux figurines custom de Dracula à l'échelle 1/6ème : une version âgée (séquences en Roumanie) et une version jeune (séquences à Londres). Il proposa ensuite ces produits "artisanaux" à la vente à prix prohibitif. Le tirage ne dépassait pas quelques dizaines d'exemplaires. Plus tard, ces créations auraient servi de base à la marque chinoise Redman Toys pour élaborer ses propres customs.

Référence sous le numéro 32, le Dracula âgé (dit "red" - rouge) est une figurine intéressante alors que la version jeune (dite "blue" - bleue) s'avère totalement ratée. En conséquence, cette dernière ne sera pas chroniquée sur le blog.

Le premier contact avec un objet passe bien souvent par son emballage. Parfois, il arrive que celui-ci soit plus réussi que le jouet, d'où une certaine déception. Ici, aucun risque. Redman Toys opte pour le service minimum, soit un packaging noir au fini brillant dépourvu d'illustrations (photo 1). A l'intérieur, les parois sont en carton brut (photo 2). La figurine et ses accessoires sont logés dans une vulgaire coque en mousse. Ce dispositif peu engageant fait craindre un produit au rabais. Heureusement, nos doutes vont rapidement se dissiper.

Sur le dessus, on découvre le manteau rouge du vampire, soigneusement plié dans une pochette en plastique zippée (photo 4). Le tissus possède un bel effet satiné. Il est rehaussé de motifs dorés représentant des dragons ailés. Le fabricant parvient à reproduire ces broderies complexes en les imprimant, une solution à la fois maligne et économique mais discutable d'un point de vue qualitatif... Le mannequin porte un long chemisier blanc, ainsi que des mules rouges. Malgré son apparente simplicité, l'ensemble est fidèle aux fabuleux costumes conçus par l'artiste japonaise Eiko Ishioka, justement récompensée aux Oscars.

Un détail curieux attire l'attention : la paume des mains est recouverte de filaments simulant les poils (photos 2 et 7). Le dispositif s'avère aussi ridicule qu'inutile. Il aurait été plus judicieux de sculpter ce duvet.

Terminons cet examen par le visage. Comme on peut le constater sur les photos, la physionomie et le maquillage de l'acteur sont parfaitement restitués : teint diaphane, peau légèrement translucide, rides en abondance, sans oublier un regard expressif et profond. Malheureusement, l'usine a peint l'ensemble de la coiffe en rose clair, une teinte pour le moins étrange, alors que la créature a les cheveux blancs. Cette erreur difficilement compréhensible vient tempérer notre enthousiasme.

Les accessoires présents sont les suivants : le rasoir de Keanu Reeves (dont Dracula lèche la lame - photo 6), une paire de mains supplémentaire avec doigts effilés et une épée (photo 7).

Cette édition propose en bonus exclusif un buste de Dracula version "loup-garou" (scène du labyrinthe - photo 3). Le sculpt du monstre est assez réussi, faisant aussitôt regretter l'absence d'une figurine 12''. En 2021, une réédition du Dracula "red". Redman Toys va remplacer le buste par un nouvel accessoire exclusif : une lanterne en métal.

La boîte est fournie sans carton brun de protection. Elle n'est pas scellée en usine. Pour réaliser ces photos, la figurine et ses accessoires n'ont pas été manipulés ni sortis de l'emballage, conformément à la demande du collectionneur.

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